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Avec son break lumineux et joyeux, Dress Code du b-boy belge Julien Carlier ouvre la soirée du Focus Hip-hop à Charleroi danse. Sur le plateau, cinq interprètes en survêtements s’étirent les poignets, les cervicales, sautillent sur place, puis s’élancent sur la piste comme portés par la même énergie. Se déploie avec joliesse une chorégraphie quasi organique, ponctuée d’acrobaties au sol, où rien ne semble forcé. Peut-être faut-il voir dans cette attention à la physiologie la formation en kinésithérapie de Julien Carlier, qui a précédé ses débuts de chorégraphe ? Au fur et à mesure, les interprètes nous emportent avec entrain dans les coulisses de leur entraînement, comme pour rendre hommage à l’esprit « peace, love, unity and having fun » de la Zulu Nation des années 70’, aux débuts du hip-hop. Puis, alors que la lumière se tamise, les danseurs et danseuses se lancent les uns après les autres dans des figures plus virtuoses - headspin, ninety nine ou encore freeze. Emportés par le groove de la musique, ils font jaillir leur énergie communicative, leur complicité et leur amour de la danse. Ce break gracieux prend le contrepied des représentations liée à la force, à la virilité et même à la brutalité qui y sont parfois associées. Grâce à son écriture subtile, Julien Carlier déploie un ballet convaincant, où l’on jouit aussi bien de la capacité du chorégraphe à amener les corps dans une même fréquence, que de la virtuosité de chaque interprète. Avec adresse, il nous fait goûter une qualité primordiale de cette danse sociale : le plaisir d’être ensemble.

 

 

Métamorphoses troublantes

Entre chien et loup, le Monstrare et/ou Monere de Milø Slayers nous plonge ensuite dans une ambiance plus ténébreuse. Affublé d’un anorak fermé au-dessus de sa tête, se tient un personnage inquiétant, un géant sans visage. Au fil des tableaux qui rythment la pièce, comme autant de monstres, il se métamorphose à travers des gestes, attitudes et danses qui suscitent tantôt la curiosité, le malaise et l’amusement. Dos à nous, il fait onduler ses vertèbres, comme des créatures logées sous sa peau, puis, penché en avant, fait danser ses fesses qui se substituent à son visage ou encore se lèche comme un animal en se pinçant les tétons, par alternance. Dans cette atmosphère sombre, brumeuse, quasi-fantastique, il nous invite à nous aventurer dans un espace indéfini où réside le monstrueux. Un entre-deux où surgissent des figures insaisissables et où s’entremêlent caractéristiques humaines, animales, végétales, minérales ou venues d’autres planètes. Cette proposition dense révèle une facette plus sombre du hip-hop, où l’alliance des techniques urbaines - notamment du new-style - et de la danse contemporaine déforme l’image du corps. Alors que la pièce se termine, Milø Slayers ne salue pas. Son visage, que l’on a à peine pu deviner restera dans l’ombre. En sortant de la salle, il a laissé pour nous une pochette qui compile des extraits de ses recherches, mené pendant deux ans à l’Académie Royale des Beaux-Arts de Bruxelles, histoire d’inviter le monstre à la maison.

 

> Focus hip-hop a eu lieu du 23 au 25 juin aux Écuries de Charleroi danse, Charleroi, Belgique

> Dress Code de Julien Carlier le 5 février 2022 au centre culturel Jack Frank, Bruxelles ; le 10 février 2022 dans le cadre du festival Pays de Danses à Liège

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