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Il est difficile de chroniquer l’exposition Milléniales au MECA, le jeune espace du Frac Nouvelle Aquitaine à Bordeaux, sans tenir compte de l’architecture qui l’accueille. Et si l’on peut comprendre que les masques anti-Covid n’aident pas à l’ambiance, il faut tout de même s’avouer consterné par l’atmosphère impersonnelle que dégage la structure en béton jaunâtre, très old school du type Arche de la défense. C’est dans cette ambiance réfrigérée, après s’être précipité dans l’ascenseur, que l’on parvient sur le vaste plateau blanc où se situe l’exposition, découpée en six sections : Portraits, Public/privé, Histoire, Paysages, Natures mortes et La peinture hors du cadre.

Milléniales, qui ne dégage pas davantage de chaleur que son écrin, déplie dans un accrochage très sage les intentions du commissaire Vincent Pécoil lequel précise, dans le livret, avoir sélectionné des œuvres réalisées « par des artistes de toutes les générations confondues et choisies parmi les collections publiques françaises en raison de leurs places significatives dans l’évolution de la peinture récente ». Malgré les réticences inspirées par le cadre, et certainement aussi parce qu’il est rare de visiter une exposition de cette ampleur entièrement consacrée à la peinture contemporaine (hors les monographies d’artistes), Milléniales mérite une longue visite.

Vue de l'exposition Milléniales, Peintures 2000-2020 au Frac Méca. p. Gaëlle Deleflie

 

Les artistes y sont nombreux, plus de 50, et si l’on regrette l’absence relative des femmes (seulement une douzaine), le choix des œuvres y est très souvent pertinent. Même s’il faut bien remarquer que la peinture figurative, celle qui dialogue avec les images du réel ou de la fiction y est peu mise en valeur. Lorsqu’elle est citée, c’est toujours avec beaucoup d’ironie : à l’exemple de l’œuvre de Nina Childress intitulée La haine de la peinture, du magnifique portrait de zombi de Jean-Luc Blanc, ou des superbes grands incendies des toiles de Gerald Petit, comme si l'image ne pouvait que se consumer.

On observe alors que Vincent Pécoil est beaucoup plus à l’aise avec des formes plus abstraites, voire des signes. Une toile, celle de Régine Kolle, vous dit littéralement « Bonjour », pendant qu’une autre, celle de Camila Oliveira Fairclough, souhaite tout aussi frontalement le « Bonsoir ». Ce sont aussi de multiples variations autour de la grille formaliste avec Sarah Morris, Sergio Sister, Peter Halley, Nicolas Chardon, Philippe Decrauzat. Et puis surtout de multiples jeux, plus ou moins affirmés, avec le réalisme abstrait, une appellation oxymorique qu’affectionne le commissaire, à l’instar des ronds de fumées de Vincent Ganivet, des appels téléphoniques de Sylvie Fanchon ou encore des œuvres genrées de Michael Scott qui présente deux formats moyens composés de fines rayures. L’un est rose et l’autre bleu, et les teintes...layettes.

Pour le commissaire d’exposition, « la peinture contemporaine inclut son environnement numérique dans son scénario de production en assumant aussi le fait d’être une forme obsolète par rapport aux évolution techniques récentes ». Sans revenir sur les débats récents qui font que ceux qui se posent des questions sur l’obsolescence de la 4G seraient possiblement des Amishs, j’affirme que si, comme toute technique, la peinture contemporaine tient compte de son environnement, celle-ci est très loin d’être obsolète dans son rapport à la technique numérique. Elle est bien davantage complémentaire, dans une forme de corrélation, c’est à dire un ensemble de liens qui restent à définir, sans que l’on sache encore précisément quelle technique agit le plus puissamment sur l’autre.

 

> Milléniales Peintures 2000-2020, jusqu’au 3 janvier à MÉCA, Frac Aquitaine, Bordeaux

 

Image : Sérgio Sister, Caixa # 224, 2013, collection Frac Nouvelle-Aquitaine MÉCA © Sérgio Sister, p. J. C. Garcia

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