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Il y a deux ans, lorsque nous avions sympathisé avec lui lors de sa venue à la Quinzaine, l'auteur de Bad Lieutenant (1992) avait fièrement fait monter sur scène sa nouvelle famille : sa compagne, la Moldave Chritina Chiriac, leur petite fille, Anna Ferrara, la belle-mère et ses musiciens, dont le compositeur de pratiquement tous ses films, celui ne faisant pas exception à la règle, Joe Delia. Nous croisions le rangé des voitures chaque matin sur le coup de onze heures, rapportant des croissants frais à ces dames.

Sa variation autoréflexive sur un mode initié par Fellini et Bergman, en un premier temps, s'appesantit sur le quotidien en apparence paradisiaque du couple installé dans un magnifique appartement à Rome. On sent peu à peu que tout ce bonheur pour réclame publicitaire risque de se défaire. Tandis que le protagoniste vaque à ses occupations – courses de proximité, écriture d'un scénario, financement du film à venir, sans doute celui auquel on assiste, apprentissage de la langue italienne, dispense de cours de théâtre suivant la méthode Stanislavski, réunions d'alcooliques anonymes et pratique thérapeutique du yoga –, la jeune femme n'a pour perspective que la vie de mère de famille.

À tort ou à raison, le cinéaste anticipe la trahison de sa compagne avec un homme bien plus jeune que lui qu'il se met à voir au parc fréquenté par sa fillette, autour du bac à sable. Sa jalousie explique en partie son irritabilité. Pour se consoler, il flirte avec une étudiante, une serveuse de café, une assidue des séances d'alcooliques. À partir de là, le film prend une autre tournure : du bonheur d'emprunt on passe à toutes les formes de passion, y compris religieuses, avec notamment une scène de crucifixion. Fantasmes, cauchemars, tics et tocs, fixettes, et autres flashback se mélangent aux éléments réels et rendent la deuxième partie du film palpitante.

 

> Tommaso d’Abel Ferrara

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