Un fumeur en kimono devant une pub Coca-Cola, un bourgeon au milieu de ses congénères déjà éclos, une chèvre occupée à ronger sa corde : les instants que saisit Issei Suda au Rolleiflex naviguent entre chroniques du quotidien et images fantastiques. Le photographe écume les fêtes populaires estivales dans la banlieue de Tokyo au tournant des années 1970, juste après les « Golden Sixties » dans le sillage du départ de l’armée américaine. C’est au cœur d’une société en pleine transformation, et d’un Japon converti à vitesse éclair aux dogmes occidentaux, qu’il perçoit des survivances séculaires. Par la force des contrastes, du noir et blanc et du cadrage, sa série « Fushikaden » sape la mainmise de l’impérialisme sur les corps et de la folklorisation qui en découle. (Orianne Hidalgo-Laurier)