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Comment vit la jet-set de Tel Aviv pendant que Tsahal pilonne Gaza, à tout juste 70 kilomètres de là ? Dans l’excès, hors sol, dopée à la propagande d’État, plus carnassière que jamais. C’est cette réalité que pénètre Oui, cinquième long métrage du réalisateur israélien Nadav Lapid, basé à Paris depuis 2021. Un film inconfortable, qui éclate à la gueule, saisi de convulsions et de ruptures de ton, « malade » d’après son propre auteur. Comme témoins embarqués de cette hystérie collective, le cinéaste a choisi Jasmine et Y., couple d’entertainers-escorts survoltés, de toutes les soirées mondaines. Elle est danseuse, bien décidée à en découdre avec les machos fachos du pays. Lui est pianiste-performeur et négocie sa soumission au régime qui lui commande un hymne appelant à la conquête de Gaza. Dans les résidences de luxe de la capitale, on se débauche en serrant les dents tandis que les notifs de smartphone font le décompte des victimes et qu’au loin, la fumée des bombardements s’élève dans le ciel. Sous une forme hallucinée, Oui dit la gangrène morale qui ronge les élites israéliennes. Un brûlot moderne dont répond Nadav Lapid, conscient de signer là son dernier film dans son pays natal.

Un entretien extrait du n°127 de Mouvement


Votre film semble obéir à un surrégime constant, comme un entrechoc d’images et de sons. 

 

Vous connaissez la fameuse question : « Que feriez-vous s’il ne vous restait que quelques jours à vivre ? » Eh bien au moment du tournage, chaque jour semblait être le dernier, il régnait une atmosphère de fin du monde. C’était donc nécessaire de tout mettre au même niveau – images, musiques, sons. C’est comme la palette d’un peintre. Un cinéaste ne peut pas se restreindre, le cinéma est une imitation de la vie. Dans ce film, chaque son, chaque détail compte. Même dans l’horreur, tout devait être sublimé. La mise en scène traduit cette voracité, une volonté délibérée de trop-plein. Je voulais capturer Tel Aviv avant que sa capacité d’exister ne soit altérée : les arbres encore verts, la mer toujours belle, le coucher du soleil intact. Je pressentais que je ne pourrais plus tourner en Israël après ce film. Un simple jus d’orange, chaque vendeur de rue, tout devenait indispensa

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