CHARGEMENT...

spinner

Assurer la mise en scène du spectacle de sortie d’école du CNAC, c’est accepter de se frotter à l’impératif d’un casting important et imposé. C’est aussi l’enjeu de construire une écriture qui laisse apprécier les qualités de chacun, pour ces jeunes circassien.ne.s arrivé.e.s au terme d’un cycle décisif dans leur carrière. Ajoutez à cela un vilain virus, des conditions de répétition incertaines, une acrobate salement blessée, et la déception d’une première présentation au Cirque de Châlons – la maison mère – interdite de public à la dernière minute. Voilà qui suscite les pires pronostics. Et fait une surprise d’autant plus heureuse, en dévoilant, avec Le cycle de l’absurde, une véritable proposition artistique. L’enchaînement poli de numéros laisse place à l’enchevêtrement subtil des prouesses individuelles incorporées dans l’harmonie de tableaux collectifs.


Le collectif en toile de fond 

Sur la piste, pas l’ombre d’un Monsieur Loyal, mais seulement le filtre crayeux d’une lumière blanche en guise de régisseur. Dans un dress code tout en noir et blanc, les quinze circassien.ne.s évoluent sur la piste au gré des changements d’éclairage : pour cette création qui fait la part belle aux éléments impalpables, Raphaëlle Boitel a opté pour une scénographie littéralement photographique, où la lumière fait naître et disparaître les artistes et les agrès, où les mouvements de projecteurs marquent des coupes franches dans l’air lourd de fumigènes et de magnésie. L’espace de la piste se résume à ce qui n’est pas tenu dans l’ombre, et oblige à la concentration des regards sur les portions de lumière. Les entrées et sorties foisonnent et tiennent le rythme, rarement pour annoncer l’ouverture d’un numéro, mais plutôt pour offrir le spectacle de déplacements collectifs tendus d’énergie, la mélodie des souffles en canon, et le mouvement du vent sur la nuée de cheveux libérés. Avec un titre qui pourrait être celui de l’année écoulée, Le cycle de l’absurde régale autant par l’allégresse d’un solo de roue allemande livré en slow motion, la bouffonnerie toute beckettienne d’un Erwan Tarlet jusqu’au-boutiste sur la terre comme dans ses sangles, ou la puissance métaphorique du « spider », agrès créé pour l’occasion et qui permet à cinq porteurs de remonter et faire évoluer dans les airs l’un des leurs, pourtant dernier de cordée.


> Le cycle de l’absurde de Raphaëlle Boitel – Cie L’Oublié(e) avec les élèves de la 32e promotion du CNAC a été présenté en séance professionnelle du 15 au 17 décembre au Centre national des arts du cirque, Châlons-en-Champagne ; le 22 et 23 juin dans le cadre du festival Le Mans fait son cirque ; du 21 au 31 juillet à La Villette, Paris

Lire aussi

    Chargement...