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Vous avez fait quoi, vous, pendant le confinement ? Le tandem Baro d’Evel est de ceux qui n’ont pas chômé. Blaï Mateu Trias, lui, s’est mis à la poterie. Camille Decourtye, elle, à écrire des chansons. L’un comme l’autre en « a mis partout ». En témoignent les multiples vases et le répertoire de nouvelles chansons (interprétées avec le guitariste Nicolas Lafourest) qui peuplent leur nouveau spectacle La Cachette. Pour autant, les artistes n’en tirent aucune gloire : « Quand on désire faire quelque chose depuis longtemps et qu’on s’y met, c’est pénible. »


Refusant autant la nostalgie que la sacralisation béate, cette création tient le curieux printemps 2020 à distance. Entre spectacle musical et concert performé, ce toujours-plus-que duo conserve ce savant équilibre dont lui seul a le secret – la paire cumule déjà deux décennies de cirque, de musique et de performance sur un fil tendu entre profondeur existentielle et délicat second degré. Ici nommé presque mythologiquement « quand on avait du temps », le confinement n’a apporté aucune certitude, ni fixé aucun grand principe, seulement remis en tension la grande valse des interrogations, qu’elles soient venues du sol raboteux du quotidien ou de l’immense possible qu’on a entraperçu. Cette période a mis face à l’urgence, révélé le machisme ordinaire là où il se loge – sans surprise, et comme le diable : dans les détails –, et pour ceux qui ont eu le luxe de s’arrêter, provoqué quelques vertiges. Le poids d’une vie entière en quelques semaines. Et l’entêtante question qui en découle : comment habiter ce temps, ce si peu de temps, qui nous est imparti ?


Comme protégés par leur complicité, Camille Decourtye et Blaï Mateu Trias s’immergent tout entiers dans l’émotion. Ils savent qu’il leur suffit d’une fraction de seconde et d’une tendre pirouette pour désamorcer toute intensité. Leur relation les protège encore de fixer leurs paradoxes dans des identités stables, lui avec sa silhouette dégingandée à la mélancolie toute chaplinesque, elle avec sa puissante fragilité. La Cachette n’est peut-être que l’autre nom de ce lien-là. Suffisamment fort pour pouvoir être lâche, suffisamment accueillant pour que puissent y coexister les différentes versions de soi-même, suffisamment extensible pour y inviter tous les alliés, de création comme de combat, qu’ils soient guitaristes, oiseaux, cheval, tour de poterie ou simples mots.



La Cachette de Baro d’evel a été présenté du 15 au 17 février à l’Opéra de Lyon

⇢ du 20 au 23 mars au Théâtre Sorano, Toulouse

⇢ les 2 et 3 avril au Parvis, Tarbes

⇢ du 10 au 18 mai au Théâtre des Bouffes du Nord, Paris

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