CHARGEMENT...

spinner

Dans l’obscurité, on distingue des grappes de mégaphones, des projecteurs éteints, un imposant échafaudage et, loin au-dessus, une balise de signalement rouge qui clignote. Quel est donc ce péril qui menace ? Une trompette interrompt les tergiversations du public. Au rythme des percussions, une troupe d'une douzaine de performeurs se met en branle et envahit le plateau. Sous des ordres donnés au mégaphone, d’immenses morceaux de cartons voyagent d’un côté à l’autre de la scène, des tasseaux de bois de plusieurs mètres virevoltent dans les airs, des lettres à taille humaine déménagent, des câblages sont attachés au sommet d’une haute structure métallique. Impossible de saisir le tableau d’un seul regard, il faut choisir ce que l’on veut regarder dans ce présent en constante mutation.

 

Là, les lettres se rencontrent en formant de fugaces associations puis dégringolent. Ici, d’insolites vêtements colorés, signés par le designer japonais Satoshi Kondo, forment des spectres qui menacent le public avant d’être enfilés par les danseur·ses. De ongues tiges de bois fouettent le plateau. De minuscules drapeaux sont plantés au sol puis piétinés. Le rythme imposé par les percussions est régulièrement rompu. Les gestes passent et repassent de l’aérien au tellurique. Tout est précaire, recommencé, remodelé. Un mouvement obstiné que la pièce ne rattache à aucune trame narrative. 

 

Que faire alors d’un spectacle qui refuse d’avancer, de passer à la suite, de faire advenir ce grand final, ces derniers feux ? Certains abandonnent les gradins. Et si le reste de la salle les suivait, ce chaos prendrait-il fin ? Certainement pas, tant l’urgence de l’action qui motive cette équipe est palpable. Alors quoi ? Mise en scène d’une pure force vive ? Image d’une lutte collective face à la menace insidieuse ? Révolte désordonnée suite à l’annonce d'un désastre ? Sexe, classe, race, écologie – on pourra mettre ce que l’on veut sous cette balise tant, à cet instant, tout semble aspiré dans une même infinie frénésie insurrectionnelle dont Némo Flouret dresse un tableau brut, sans appel. 

 


Derniers Feux de Némo Flouret a été présenté du 19 au 25 juillet dans le cadre du Festival d'Avignon à la Cour du lycée Saint-Joseph, Avignon 

 

 les 26 et 27 septembre dans le cadre du festival Actoral au Mucem, Marseille

Lire aussi

    Chargement...