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Un chalet d’alpage trône sur scène, ambiance colonie de vacances avec lits superposés et petit mobilier de bois. Tout ce qu’il y a de plus typique, si ce n’est que les invités entrent dans la bâtisse par un monte-charge telles des assiettes de banquet, déclenchant l’hilarité dans le public. Que sont-ils venus faire là-haut, ces VIP un peu weirdo des quatre coins de l’Europe ? On ne saura jamais vraiment. Des formalités administratives justifient tout juste leur présence – de gros classeurs signés au pas de course. De l’extérieur parviennent des nouvelles pour le moins inquiétantes : l’air des montagnes venant à manquer, on s’est mis à le cultiver dans les champs. Pourtant, au « sommet », l’ambiance est à la détente, au gala d’apparat et aux discours pompeux.

 

Avec sa nouvelle création, le Suisse-Allemand Christoph Marthaler, artisan d’un théâtre de l’absurde depuis près de cinquante ans, compose une comédie de la vacuité du pouvoir réglée comme du papier à musique. Si la narration est délicieusement flottante, embarquant ses protagonistes dans une suite de petits riens de plus en plus loufoque, la mécanique du rire suit une partition implacable qui donne à la pièce son architecture. La rythmique est impeccable et imparable : dans le ballet des corps chorégraphié au millimètre, dans la qualité des gestes. Et surtout dans les répliques qui tombent du tac au tac – mais surtout dans le fossé – et ne cessent de creuser la distance entre ces personnages coincés côte à côte mais inaptes à comprendre ce « qu’ensemble » veut dire. 

 

Ces échecs répétés du langage pourraient faire basculer Le Sommet dans la cruauté ou le cynisme. Mais l’humour, dosé à la perfection, permet à la pièce d’avancer en équilibre sur une crête entre absurde et douceur, ironie et tendresse. De quelle qualité de rire avons-nous besoin aujourd’hui, d’abord pour survivre et ensuite pour lutter ? Peut-être quelque chose dans ce goût-là, qui nous fait penser en sortant de la salle : qu’ils y restent au sommet, les puissants. Qu’ils s’amusent à leurs petits jeux et nous foutent la paix. On se débrouillera bien mieux sans eux. 



Le Sommet de Christoph Marthaler a été présenté du 16 au 25 mai dans le cadre de Tempo Forte au Théâtre Vidy-Lausanne (Suisse)


⇢ du 12 au 17 juillet à la FabricA, Avignon

⇢ du 3 au 9 octobre dans le cadre du Festival d’Automne à la MC93, Bobigny

⇢ du 7 au 12 novembre au Théâtre National Populaire, Villeurbanne

⇢ du 18 au 20 novembre à Bonlieu, Annecy

⇢ du 3 au 4 décembre au tnba, Bordeaux

⇢ les 10 et 11 décembre aux Gémeaux, Sceaux 

⇢ les 12 et 13 février au Maillon, Strasbourg

⇢ les 11 et 12 mars à Malraux, Chambery

⇢ les 20 et 21 mars à la Filature, Mulhouse

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