Le spectacle des humains peut se contempler de loin. Comme un panorama, un atlas ou un paysage. La chorégraphe belge Louise Vanneste s’y attelle depuis plusieurs créations. En 2021, Earth suivait le mouvement des premières formes de vie : les plantes. En 2024, 3 jours 3 nuits suivait les phénomènes géologiques et le gigantisme chimique de notre planète. Aujourd’hui, Mossy Eye Moor change d’échelle pour traquer d’autres ondulations : celle des plaques tectoniques.

Ce sont pourtant bien cinq humain·es qui occupent la scène. Autour d’eux, une toile d’inspiration médiévale dans un coin, un jeu de boules en bois dans l’autre, un miroir sur trépied au centre, le tout dans des lumières pastel. Serions-nous en plein âge du feu ? Un texte projeté nous situe en Pangée, quand nos cinq continents ne formaient qu’un il y a 300 millions d’années. Un appel à régler ses lunettes sur un temps lointain et un espace bien plus grand que nous.
Pour déchiffrer ce qui se produit devant nos yeux, il s’agit donc de prendre le recul nécessaire et d’observer plus que de regarder. Ici des ondulations de bassin, là des mains qui frétillent, des roulés au sol, des tapotis de pieds. Jamais à l’unisson, chacune des cinq danseur·euses exécute ses propres mouvements. Malgré cela, tous·tes s’unissent dans une même énergie pour composer un tissu curieusement uniforme.

Une drôle de magie opère alors : le temps sur le plateau semble s’écouler à une autre allure que dans les gradins, en accéléré comme dans ces vidéos time lapse qui rendent visible ce qui se déroule sur une durée non-humaine – celle des plantes, des écosystèmes ou des roches. Malgré la singularité de cette matière temporelle, Mossy Eye Moor respecte une convention formelle : le spectacle dure une heure, avec un début et une fin. Et c’est sans doute cet équilibre qui donne sa force à la proposition de Louise Vanneste : une illusion fantastique surdimensionnée, contenue dans les limites de l’appareil scénique.
Mossy Eye Moor de Louise Vanneste a été présenté du 21 au 24 mai dans le cadre du Kunstenfestivaldesarts à la Raffinerie, Bruxelles
⇢ le 5 juin dans le cadre de June Events à l’Atelier de Paris
⇢ le 27 novembre au Vilar, Louvain-la-Neuve (Belgique)
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