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Lydie Salvayre nous prévient : « J’écris parce que je ne sais pas parler. Vraiment. » Pourtant, dire qu’elle se prête au jeu est encore en deçà de la réalité. Formes littéraires, époques, continents, engagements politiques : sa conversation fait feu de tout bois. Dans son texte Irréfutable Essai de successologie, la lauréate du Goncourt 2014 défonce les mondanités culturelles dans un éclat de rire érudit. Une lecture rafraichissante en pleine rentrée littéraire. 

Entretien extrait du Mouvement N°116


Vous publiez Irréfutable essai de successologie, satire ironique de notre époque où le commentaire et le bavardage ont pris le dessus sur toute autre forme de parole publique. Qu’est-ce qui, dans notre présent, a rendu nécessaire l’écriture de ce texte ?

Notre société est obsédée par le succès. Le succès à tout prix. Le succès comme seule fin, comme seule aspiration, comme seul rêve. Le succès par tous les moyens, jusqu’aux plus odieux. Je me suis amusée à faire l’éloge paradoxal des meilleurs moyens pour obtenir ce succès : discours mielleux, déhanchements, roucoulements, flagorneries, mensonges, vacheries, intrigues et entourloupes... en...

s... en essayant de mettre les rieurs de mon côté. Pour mieux faire apparaître que la littérature est fille de l’obscurité et du silence, et que nos vies ne pouvaient que s’abîmer dans cette soumission à l’épate et à la vantardise.



Par antiphrase, vous prenez les satires d’auteurs classiques au pied de la lettre, notamment le Règlement pour une société de plaisir de Machiavel, dans lequel tout le monde parle en même temps. Notre monde aurait-il paradoxalement peu  changé depuis la Renaissance si la satire s’y déploie de la même façon ?

Les moralistes ont toujours été très mal vus, mais poser un regard impitoyable sur les travers de l’époque, ses fai- blesses et ses aveuglements, c’est toujours intéressant. Avant et pendant l’écriture, j’ai relu Machiavel, Gracian, Swift, Chamfort, La Bruyère. Le titre de mon livre est un clin d’œil à Swift. Et leurs portraits m’ont paru étrangement actuels. Les acteurs ont changé mais la comédie sociale, à peu de choses près, reste la même. Et elle se joue dans tous les milieux. Si je me suis attardée sur le milieu littéraire, c’est parce que je le connais mieux que les autres, et

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